Un peu de temps a passé... mais je tiens à raconter la suite de mes aventures, pour exorciser le trauma, toussa, toussa.
J'étais donc avachie allongée élégamment dans la neige après avoir tenté de me relever, -j'allais bien finir de descendre cette piste !-, quand l'impression que ma jambe se dérobait et une douleur fulgurante m'ont fait choisir ainsi qu'à mes collègues restés gentiment à mes côtés, d'attendre les secours que l'un d'entre eux est allé prévenir.
J'ai eu le temps d'avoir froid mais un sauveteur est arrivé avec son traîneau et s'est penché vers moi avec sollicitude (un mélange harmonieux de Paul Newman, Robert Redford, George Clooney, Brad Pitt, ah et Jude Law, bien sûr !).
Je vous livre en exclusivité quelques éléments de notre conversation :
- ça va ?
- ben moyen...
- Moi c'est Mimo, comment tu t'appelles ? (tu es à la montagne et tu skies, tu parles anglais en français : tout le monde se tutoie)...
- Hélène...
- Ok Hélène, qu'est-ce qui t'es arrivé ?
(récit de mes exploits)
- Tu es à Valloire depuis quand ?
- Beeeen... tout-à-l'heure... la fin de matinée
- Ah, c'est dommage, j'espère que cela ne va pas te gâcher ton séjour à Valloire !
- J'ai un peu peur quz si... mais bon... je n'ai jamais fait de traîneau...
- Alors tu vas tester (sourire)... j'ai un objectif : que tu n'aies pas mal...
- Ok, ça me convient bien.
- Profite quand même de la descente !
J'ai pu donc tester le traîneau, ça manquait à mes expériences montagneuses, même si la descente à l'envers emmaillotée dans une barquette qui brinqueballe sur la neige est moyennement agréable. Mais bon. Je pense qu'il faut l'avoir fait au moins une fois dans sa vie, c'est sûr.
Mimo m'a laissée à des ambulanciers, idem, je n'avais jamais fait, l'ambulance... J'ai eu un peu peur de tomber du brancard dans la neige, mais je suis arrivée sans encombres au centre médical...
Là, j'ai commencé à attendre, à re-avoir mal, à avoir froid, à me maudire d'avoir accepté ce *$%£%$* de we...
Une auxilliaire médicale, ou je ne sais, a fini par s'intéresser à moi...
Toute personne normalement constituée se serait inquiétée pour moi et aurait cherché à me réconforter "Ma pauvre ! mais que vous arrive-t-il ? vous avez mal ? je peux faire quelque chose pour vous ? etc"... et là, j'entends - alors que mon genou et moi étions en train de mourir de douleur sur notre brancard - :
- "Aaaaah ! Mais vous n'êtes pas JEEEUUUNE !!! HEY !!! (à la cantonade) LES FIIIIIILLES !!! C'est une UCPA, mais c'est pas une JEEEEUUUUNE !!! (en se tournant vers moi) Oui, vous comprenez, quand on nous annonce une UCPA, on attend une jeune !!! mais vous êtes pas une JEEEUUUNE*...
Keskonrigole.
Très sincèrement, j'ai moyennement apprécié, ma mésaventure ayant ré-expédié direct mon sens de l'humour au niveau de la mer... et malheureusement, je n'avais pas encore de béquille pour lui fermer son caquet, à cette grognasse.
Elle est partie ricaner avec ses collègues, "c'est un genou... Oh oui, encore un gnou ! hahaha ! Oh, on en a des gnous... pas beaucoup de girafes ni de rhinocéros, mais des gnous, on en voit tous les jours... hahaha... blablabla..."
Moi, qui étais toujours à l'agonie avec mon genou, je dis, trop d'humour tue l'humour...
J'ai vu le médecin une première fois qui m'a trituré le genou et parlé d'une entorse, sans doute bénigne, puis demandé à l'auxiliaire-qui-n'était-pas-ma-copine de me faire des radios.
Heureusement, tout se fait sur place, ils ont l'habitude !
Evidemment, elle m'a fait ultra mal en me tordant la jambe dans tous les sens, ce qui déjà n'est pas agréable avec un genou sain, et est SUPER DOULOUREUX avec un genou blessé, grognasse !
J'aime bien "grognasse", ça soulage.
Mais elle, je la déteste.
J'ai encore beaucoup attendu avant de revoir le médecin, alors qu'avec mon genou, nous étions toujours au plus mal (voire de plus en plus mal), heureusement, des collègues qui ne skiaient pas, m'ont rejointe. Le côté team-building de ma mésaventure a marché à fond ! Mes collègues ont été super sympas !
Le médecin m'a alors annoncé que j'avais une entorse grave avec atteinte du ligament intérieur et rupture partielle ou totale des ligaments intérieurs... j'ai eu du mal à le croire ! Bon, il a été sympa en me disant que c'était la blessure des grands champions de ski. Il m'a parlé de l'immobilisation par attelle, puis kiné, opération seulement si nécessaire, etc.
Et m'a laissée une ordonnance... Et tout comme les mannequins, chanteuses et actrices sont fabriquées dans un matériau qui ne vieillit pas, les médecins sont réalisés dans un matériau qui ne souffre pas !
Je le cite : "Doliprane si douleur... béquilles si nécessaire"
Mais béquilles de compétition à crampons -amovibles-, ceci dit...
Bien sûr que j'ai eu super mal... je n'ai quasiment pas dormi la nuit du vendredi au samedi. L'avantage est que nous étions 6 dans la chambrée et que la liste a été faite heure par heure de celles qui avaient ronflé mais que toutes ont eu la délicatesse d'éviter de me dire si je ronflais ou pas ! (de toute façon, je n'en aurais pas eu le temps !).
Avantage bis de la situation : tout le monde a été / est super gentil avec moi !
La suite du we au Centre UCPA, avec une attelle du haut au bas de la jambe que je pouvais à peine poser par terre, les béquilles... tous les déplacements que cela implique, les portes à "groom" qui pèsent une tonne, la chambre exigüe, etc, n'a été que du bonheur of course...
Le lendemain, le cuisinier du centre UCPA m'a interpellée alors que je me traînais douloureusement pour aller déjeuner : "Oh ma pauvre ! mais qu'est-ce qui t'est arrivé ?" (je rappelle : tu es à l'UCPA > tu ES JEEEUUUNE > tu es tutoyé d'office),... blablabla... "Ah, ma mère en a eu une aussi ! Elle s'est bien remise, finalement on l'a opérée, elle était limite pour l'âge parce qu'elle avait quand même 45 ans (!!!), mais elle va bien".
Bon, et là mes collègues qui pouffent de rire... mais j'aurai ma revanche parce que le temps finira bien par leur faire franchir les 40 ans à eux aussi...
Voilà, voilà l'essentiel de mes (més)aventures à Valloire...
Sinon, c'est joli, Valloire... en plus, il a fait plutôt beau...
Bon, pas là, mais sur d'autres photos, si.
Depuis, il a neigé à Paris... si j'avais su, j'aurais évité la montagne ! (ceci dit, j'ai pu rentabiliser mes crampons...)
Mon genou se remet petit à petit, je retire progressivement l'attelle, et j'attaque la kiné lundi...
* Cette remarque fait encore mourir de rire mes collègues et ma fille.